L’étude Aquatopia Potentiel hydrologique et économique des NRU

Les EGEB dans le cadre de sa Fiche Action 22 de l’Alliance Emploi Environnement – Axe Eau a pro- posé de mener une étude sur le potentiel hydrologique et économique des Nouvelles ri- vières urbaines. On appellera Nouvelles rivières urbaines l’ensemble des ouvrages décentralisés qui permettent à l’eau de s’infiltrer, de s’évaporer (transpirer), d’être ralentie voire utilisée pour de multiples fonctions. L’ensemble de ces NRU forment le maillage bleu+ ou le maillage pluie.

L’étude a débuté en novembre 2015 et a été menée par, notamment, Ambroise Romnée d’Architecture et Climat (un centre de recherche de l’UCL). L’étude a été suivie par un comité d’accompagnement constitué d’une bonne dizaine d’acteurs institutionnels (opérateurs de l’eau, administrations), académiques....

A la base, il y a l’hypothèse que des alternatives sont possibles à la construction d’un bassin d’orage, en l’occurrence celui, d’une capacité de 50.000 m3 prévu dans le bassin versant du Molenbeek. C’est donc le territoire concerné par ce bassin d’orage qui a servi de périmètre pour l’étude.
Les objectifs en étaient en particulier de mieux connaître :
- les capacités quantitatives (en terme de flux) des NRU au départ du cas concret d’un bassin versant pi- lote, choisi pour sa représentativité dans la Région ;
- le potentiel de développement économique et d’em- ploi lié à l’utilisation des NRU partant du cas concret développé.

Le développement de l’étude

L’étude était structurée en cinq parties distinctes - bien évidemment interconnectées - les Work Packages (WP) :
- WP1 – Bench marking des dispositifs alternatifs. - WP2 – étudie le potentiel opérationnel des NRU - WP3 – étude sur le potentiel économique
- WP3 – étude sur le potentiel d’emplois
- WP5 – Rapport final...

Le nom AQUATOPIA renvoie vers une notion d’ « utopie réaliste ». Il s’agit de voir ce qui serait réalisable techni- quement s’il n’y avait pas les inévitables freins d’ordre financier, administratif... Bref, de formuler un hypothèse maximale, mais réalisable compte tenu des contin- gences géologiques, urbanistiques (bâti et dessin des voiries tel qu’ils sont, réglementations...)
A l’approche « utopie réaliste », est venu s’ajouter celle d’ « universel concret », qui indique le fait de monter en généralité tout en ne se détachant pas du substrat concret sur lequel repose la recherche...

Description générale de l’étude

La première partie (WP1) consiste en une analyse pré- cise de réalisations concrètes dans différents pays, d’aménagements visant une gestion intégrés des eaux pluviales.
La seconde partie (WP2), la plus longue décrit et ana- lyse les diverses typologies de bâtit (îlots) et de voiries du périmètre, et en analyse les caractéristiques en terme de potentiel de gestion intégrée des eaux plu- viales : infiltration, temporisation, etc.
Pour ce faire, elle passe le périmètre au peigne fin, îlot par îlot, rue par rue, détermine l’ensemble des typolo- gies qu’on y retrouve, en identifie un certain nombre que l’on rencontre le plus souvent en sont les plus ca- ractéristiques.
Elle révèle :
- 23 typologies d’îlots, parmi lesquelles elle identifie les 4 les plus caractéristiques ; elles couvrent 37% du terri- toire et représentent 68% de l’ensemble des typologies.
- 24 typologies de voiries, parmi lesquelles 7 types sont pointés, qui représentent 73% des linéaires de voiries, et couvrant 20% du périmètre.

Chaque typologie est décrite de façon très détaillée : in- clinaison et orientation des toitures, profils des voiries, tout y passe, ainsi que les conventions urbanistiques (largeur minimale des trottoirs,...) des questions liées à la biodiversité, au maillage bleu, etc.

Comme on le voit, le choix des scénarios n’est en rien arbitraire et intègre d’emblée une dimension « réa- liste » de fonctionnalité des éléments étudiés.
C’est pour ces 11 typologies qu’AQUATOPIA élabore, en s’appuyant sur le bench marking du WP1, un scénario idéal, et pour en estimer l’efficacité hydrologique, « fait tourner » le modèle de calcul hydrologique développé grâce à l’étude QuaDeau.

Quelques résultats

Les principaux résultats quant à l’efficacité hydrologique moyenne du scénario proposé serait que les quantités d’eaux de pluie suivantes ne seraient pas di- rectement rejetées à l’exutoire en cas d’épisode pluvial :
- pour les voiries étudiées, soit 20 % du périmètre, 74% en cas de pluie décennale et 100% en cas d’une pluie bimensuelle
- pour les îlots étudiés, soit 37 % du périmètre, 85% pluie décennale) et 100% (pluie bimensuelle)
Tout ceci en imaginant des dispositifs architecturaux (ci- ternes, toitures stockantes) ainsi que des ouvrages spécifiques (noues, revêtements filtrants...) qui couvri- raient environ 6 % des surfaces des îlots et 8 % en voirie. Le dimensionnement et les caractéristiques de ces ouvrages devraient bien entendu respecter les fonc- tions premières des surfaces d’implantation.
Le WP3 et le WP4 - L’étude sur le potentiel économique et l’étude sur le potentiel d’emplois

Les différents coûts pris en compte ici concernent la construction et la maintenance des ouvrages de gestion décentralisée implantés dans les typologies étudiées. Ici, l’étude démontre que le coût total volumique de techniques alternatives est largement inférieur à celui d’ouvrages classiques tels que les bassins d’orage (483 €/m3 comparativement à 1000-1300 €/m3).
Concernant le potentiel d’emploi : l’aménagement et la maintenance des ouvrages concernés ici permettrait la création de 24 à 228 ETP sur ce seul petit territoire. Cet enjeu, crucial, demande des recherches plus approfon- dies.

Critiques et limites

L’étude a été accueillie positivement. Certes, un certain nombre de critiques ont été émises, quant à la prise en compte insuffisante de certains coûts (démantèlement des voiries préalables aux amé- nagements proposés), des « incidences » , (tels les risques de pollution des sols par des hydrocarbures), sur l’estimation juste des coûts pour l’entretien et la gestion des ouvrages, ou encore de précisions néces- saires sur les emplois qui pourront réellement être créés (relatifs à l’aménagement et à l’entretien).
Enfin, une importante critique est émise enfin concer- nant le fait cette recherche ne développe pas un outil aussi aisément utilisable à l’instar de QuaDeau.

Conclusions

Cette recherche est la première du genre. La mise en risque du concept de Nouvelle rivière urbaine semble passer l’épreuve de l’opérationnalité. Il y a déjà là une conclusion importante en terme de gestion de l’eau à Bruxelles.
Certes, il faudrait pouvoir affiner certains éléments de l’étude. Mais les critiques posées n’en invalident pas le résultat. Nous proposerions bien de mener l’exercice sur d’autres territoires de la Région bruxelloise. Par exemple, nous verrions bien une étude Aquatopia sur la partie du versant en amont du square Lainé à Forest, où il est prévu la construction bassin d’orage de 5000 m3.
Par ailleurs, toujours sur le plan économique, AQUATO- PIA n’aborde pas les éléments d’externalités positifs, les aménités telles que l’amélioration esthétique ou la place belle faite à la biodiversité et à ses bienfaits en zone urbaine : régulation du climat, impact sur la santé et le bien-être...

Type: article
Composition: article
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